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Les exosomes se positionnent comme la nouvelle fascination du monde de la beauté. Le champ d'application de ces micromessagers pourrait encore s'élargir.
Exosome… Voilà un nom qui pique la curiosité. À l’entendre, on pourrait s’imaginer une invention venue tout droit d’un film de science-fiction. En réalité, les exosomes sont des vésicules microscopiques, comme de minuscules bulles, produites naturellement par les cellules. Leur rôle? Transporter des messages: «Toutes les cellules de notre corps échangent des signaux entre elles, et ces signaux doivent passer d’une cellule à l’autre. Ils sont transportés par de petites vésicules, qui sont les exosomes», explique la docteure Sophie Menkes, directrice du Centre de médecine esthétique et régénérative de la clinique Nescens, à Genolier.
Mais pourquoi suscitent-ils tant d’enthousiasme en médecine esthétique? La réponse réside dans leur capacité unique à se diriger précisément là où la peau en a besoin. Mieux encore, on peut les «remplir» d’ingrédients actifs tels que les antioxydants, le collagène ou des molécules hydratantes. Leur application entraîne une régénération accélérée des tissus du visage, une réparation profonde, ainsi qu’une amélioration de la texture et de l’élasticité de la peau. «Les premiers effets se voient déjà après une séance (de microneedling, ndlr). Chez Nescens, nous recommandons une série de cinq séances espacées de deux à trois semaines pour des résultats optimaux», précise Sophie Menkes.
En Suisse et en Europe, l’utilisation des exosomes en esthétique connaît un essor fulgurant depuis environ trois ans. «Aux Etats-Unis et en Asie, notamment en Corée du Sud, les exosomes sont employés depuis longtemps dans les soins de la peau. Ces pays sont souvent à la pointe des innovations cosmétiques», explique le médecin Kevin Sternberg, spécialiste en médecine esthétique de la Swiss Derma Clinic, à Zurich. Si ces vésicules se trouvent naturellement dans nos cellules souches, une source humaine est pour l’heure interdite en Suisse. Une solution réside dans des exosomes dérivés de plantes, comme la rose de Damas, utilisée à Genolier. A Zurich aussi, on reconnait l’efficacité de la rose en utilisant des cellules souches mésenchymateuses, prélevées dans la rose. «Elles contiennent une forte concentration de facteurs de croissance et de protéines de signalisation, ce qui les rend extrêmement efficaces», explique Kevin Sternberg.
Petits mais puissants, ces exosomes sont porteurs de nombreuses promesses. Leur taille minuscule leur permet de pénétrer la peau, contrairement à ce que laissent penser certaines idées reçues. «La membrane de l’exosome est lipidique, composée de graisse. Cela signifie qu’elle peut traverser la barrière cutanée», explique encore Sophie Menkes. Bien que les exosomes soient souvent administrés par microneedling pour maximiser leur absorption en profondeur, «cela ne signifie pas qu’ils ne sont pas efficaces lorsqu’ils sont appliqués en crème», insiste-t-elle.
Souvent comparés au PRP (plasma piche en plaquettes), les exosomes partagent des mécanismes similaires, mais offrent une action plus ciblée et intense. «Les exosomes contiennent des molécules de signalisation spécifiques. Contrairement au PRP, ils ne nécessitent pas de prélèvement sanguin et leurs résultats sont souvent plus cohérents», précise Kevin Steinberg. Une piste particulièrement prometteuse réside pourtant dans l’extraction des exosomes à partir des plaquettes de sang d’un individu. «Nous pouvons isoler les exosomes d’une personne dans son sang, que l’on injecte ensuite dans le derme», détaille Sophie Menkes. Cette avancée ouvre la voie à des soins sur mesure d’une tout autre dimension.
Des perspectives prometteuses
On entend également murmurer que les exosomes pourraient à terme remplacer les traitements au botox. Pourtant, cette idée demeure scientifiquement infondée. «Le botox agit en décontractant les muscles. Les exosomes, eux, favorisent la régénération cellulaire. Ce sont deux processus entièrement distincts», explique le médecin zurichois. Même logique pour les produits de comblement, tels que ceux utilisés pour les cernes. «Pour combler, il faut du volume. Or, un exosome ne crée pas de volume. Ce qu’il peut faire, c’est stimuler la production de collagène et d’élastine», confirme sa consœur de Genolier.
De plus, les applications des exosomes ne s’arrêtent pas à l’esthétique du visage. En matière de repousse capillaire, les résultats impressionnent déjà. Des usages plus intimes sont également en développement, notamment pour la régénération de la muqueuse vaginale. En médecine, les perspectives sont tout aussi fascinantes. «Ces petits transporteurs peuvent être utilisés pour délivrer des médicaments, y compris dans le cadre de chimiothérapies ou d’autres traitements contre le cancer. C’est la meilleure façon d’atteindre la cible. Plutôt que d’injecter directement un produit dans le sang, on le met dans un exosome qui va filer directement vers la cellule», se réjouit Sophie Menkes. Un minuscule organisme, dont les effets sont indéniablement d’une envergure bien plus grande.